mardi 10 juillet 2018

arbre fruitier dans un quartier fantôme


elle dit qu'elle sait
elle dit qu'elle sait qu'elle fait peur
elle dit qu'elle sait qu'elle fait rêver
que les cauchemars reviennent qui la lessivent qui la nettoient
que la vérité transite aussi parfois à travers ça 

qu'elle peut lire la ville
les zones mortes
le squelette des arbres
le nom truqué des rues
les symboles volés au peuple
le travelo qui pleure comme un chat la nuit passque vendu à sa naissance

qu'elle touche un maigre salaire
qu'elle a un crédit à payer
que 19 euros son entreprise appelle ça une prime d'intéressement
que son entreprise s'étonne du manque d'implication de ses collaborateurs
qu'elle ne manquera jamais de rien tant que sa fille restera sa meilleure amie

qu'elle a dit ta gueule à son père et à sa vengeance divine
son père sa nouvelle femme son travail ses collègues
sa nouvelle nouvelle femme
son père si prévisible
son père qui ne rate aucune élections
son père qui veut un nouveau chef et non pas un nouvel idéal
que manger ses parents elle comprend

que pendant ce temps
une dame cherche une compilation d'opérettes pour des funérailles
que pendant ce temps
un type se déboîte la hanche en faisant  un bras de fer
que pendant ce temps deux jeunes pénétrent dans la galerie marchande en scooter et se vengent d'un vigile en le gazant 
que pendant ce temps
deux mamies basket disent
que si tu veux être bien ça a un coût
que pendant ce temps
leurs maris constatent que les tables de jardin ne sont pas soldées
et que le ministre du budget est en réalité un évadé fiscal
un brave type mais aussi un sublime salopard

qu'elle n'est pas sûre de grand chose ces temps-ci
qu'elle vagabonde entre la colère et l'empathie
que ça fait du bien d'être superficielle quand tout est si absurde
que les corporations nous formatent
que nos modèles nous intoxiquent
nous réduisent à des figurines en arrière plan
à des bibelots
qu'elle se drogue de siestes crapuleuses et de sandwichs avec un pur poète
qui la compare à un arbre fruitier dans un quartier fantôme ou peut-être l'inverse
qu'elle le trouve beau quand il saigne
qu'elle lui prodigue les premiers soins sans le moindre pansement
qu'elle vient de jouir et qu'elle se sent enceinte de trois mois
culs nus dans la mer
leurs sourires les enlacent
elle lui dit qu'elle venait d'avoir treize ans quand l'infirmière scolaire lui lécha la nuque pendant une consultation
et que tous ces gens tatoués ne lui donnent pas du tout envie de l'être
et que sans jus de citron elle ne pourrait tout simplement pas vivre

vin des abeilles
venin des vivants
psychotraumatismes
peut-être qu'avant d'être blessés les monstres n'en étaient pas en fait
pensées secrètes qu'elle envoie au ciel

vendredi 6 juillet 2018

lâcher prise


quand l'improvisation devient un boulot
autant se trouver un vrai travail 

ciel pariétal
c'est un coup à devenir sentimental l'arrivée de la pluie qui emporte tous ces trucs funèbres
le ressentiment
l'autoflagellation
les attentats à la sandale et au pantacourt

même pas il vomit
le sorcier
même pas il sourit aux publicités qui le flattent en permanence
le sorcier
même pas il veut se venger de la classe dominante

lui dont la mère institutrice refusait son homosexualité
lui dont le père journaliste avait un amant
lui et son état second
il gobe les pintes
il y a des choses dont il a envie de se souvenir
et d'autres qu'il ferait mieux d'oublier
(comme si on avait le choix)
nulle part c'est jamais très loin
il y a des choses et nulle part c'est toujours par là

il fait n'importe quoi et ça marche
il y a tout ce vide à raconter
les agressions
les cauchemars
les mécanismes de la magie
les engrenages de l'univers
la course des légendes dans les rues
les matches amicaux qui ne le sont jamais vraiment
et les couleurs qui parlent
et les couleurs qui disent quoi  hein
tour de force
lâcher prise
le chagrin et la frustration ont toujours été là nom de dieu de merde
qu'ils y restent 

mardi 3 juillet 2018

l'été du chien


la mort
les excréments
tout est farce cruelle
et tous mes projets sont absurdes
à croire que ce monde nous donne un cœur juste pour nous le briser
je m'en branle
je viens de m'en trouver un autre que je me bricole

pas mal ce mélange de spiritualité et d'alcoolisme
pas mal ce mélange de jemenfoutisme et d'ambition
mes proches s'éloignent et j'esquive mon prochain
personne n'a le cul propre en permanence
et je ne laisse personne rêver pour moi

surtout pas les classes moyennes
surtout pas tes potes sous produit
surtout pas ceux aux âmes décrépites par un boulot à la con
surtout pas celles qui ont tant besoin d'être applaudies

c'est l'été du chien
la lumière est comme ça
la peau fait comme ça
des choses brûlent dans le frigo
c'est l'été du chien
les moucherons sont revenus
les retraités disparaissent
les trains écrasent les jeunes mamans

c'est l'été du chien
et je boxe en slip
ciel violet du panorama qui est une fête sans bruit

un truc brille dans mon imagination
qui donne des fusées à mes omoplates
et des oiseaux à mes murmures porteurs
et du vin iroquois à mes blessures fondatrices

moment sans oui
moment sans non
fréquences qui me droguent sans que je puisse savoir avec certitude s'il s'agit d'une complète communion
ou d'une totale annihilation
pure félicité en attendant
pure félicité