mercredi 21 mars 2018

déontologie

la grande poétesse outre-Atlantique prépare une micro-revue littéraire basée sur le bénévolat comme c'est coutume dans le milieu

elle aime vraiment beaucoup un de mes poèmes la grande poétesse
elle a carrément flashé dessus mais elle a aussi des principes sur lesquels elle ne transigera jamais
elle ne me publiera uniquement que sous mon vrai nom
celui que m'ont donné mes parents

je lui réponds qu'en tant que poète
ma famille m'a toujours plus ou moins considéré comme un parasite déviant
traduire par fainéant
traduire par tapette
et qu'au nom du punk de Blaise Cendrars et des indiens d'Amérique
tout ce que je ne suis pas mais qui m'éclaire et me nourrit
mon pseudonyme est un masque et un projet qui me permet de me réapproprier moi-même

certes j'en fais un peu des caisses
d'autant que j'en rajoute encore un peu quand
je me surprends à lui dire que tout cela n'est pas négociable
elle me rétorque qu'elle ne peut pas faire d'exception la grande poétesse
qu'il faut que je la comprenne
que sa déontologie est en jeu


alors ne prenons surtout pas de risque lui dis-je et restons-en là

deux jours plus tard elle me recontacte
elle a bien réfléchi
elle aime vraiment trop mon poème
elle accepte mes conditions
elle compte sur ma discrétion pour  que cela ne s'ébruite pas
je promets de garder le secret 
et je la remercie
traduire par rien à foutre de ces conneries
traduire par pitié passons à autre chose

juillet
le fanzine est mis en ligne
et il est très réussi je dois dire
modeste et intense
textes disparates et néanmoins cohérents
parfaitement enrichis qui plus est
par une iconographie pertinente

septembre
on me demande d'être rédac chef d'une revue numérique

manière de renvoyer l'ascenseur
je propose à la grande poétesse de figurer au sommaire
je reçois un mail dans la foulée
elle est positivement ravie 
elle est absolument enthousiaste
elle me demande juste le montant de sa rémunération